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Une grenouille du Makay

Une diversité surprenante

Avec plus de 266 espèces répertoriées sur son territoire, Madagascar est déjà l’un des pays les plus riches en amphibiens (4% des espèces mondiales). Pourtant, malgré les efforts de prospection menés durant les dernières années, cette biodiversité exceptionnelle est loin d’être connue de manière exhaustive. Les scientifiques s’attendent à ce que cette valeur augmente au fur et à mesure de la découverte de nouvelles espèces. On estime à plus de 400 le nombre d’espèces présentes à Madagascar ce qui signifie qu’environ 150 resteraient à décrire.

Le spécimen le plus ancien de grenouille dont nous pouvons témoigner, est apparu à Madagascar il y a environ 230 millions d’années.

Les amphibiens sont le groupe de vertébrés présentant la plus forte diversité et le plus fort taux d’endémisme à Madagascar : plus de 99% des espèces connues à l’heure actuelle sont endémiques de Madagascar. Sur les 266 espèces, seules Ptychadena mascareniensis et Hoplobatrachus tigerinus sont connues ailleurs dans le monde.

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L’herpétofaune de Madagascar, notamment pour les amphibiens, présente également un fort taux d’endémisme régional, ce qui signifie que les espèces décrites sont généralement restreintes à une petite zone géographique. Cet état de fait peut être lié à la diversité des micro-habitats présents à Madagascar mais peut également révéler une faiblesse dans l’état des connaissances des aires de répartition des espèces.

Les amphibiens de Madagascar sont représentés exclusivement d’espèces de l’ordre des anoures.

Ces espèces appartiennent à cinq familles différentes :

  • Discoglossidae (1 espèces) ;
  • Hyperoliidae (11 espèces) ;
  • Mantellidae (187 espèces) ;
  • Microhylidae (66 espèces) ;
  • Ptychadenidae (1 espèces).

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Habitat

Les amphibiens se trouvent dans divers types de milieux naturels, sur l’ensemble de Madagascar, mais la plus grande partie des espèces est localisée dans le secteur oriental du pays. A l’origine, cette partie était dominée par la forêt pluviale, mais la majorité de ces forêts a aujourd’hui disparu. Elle a été convertie en terrains agricoles ou exploitée pour son bois noble. Il demeure tout de même des parcelles de forêt assez étendues à Madagascar, dont certaines sont protégées, comme le Parc National de Masoala (230 000 hectares). Cependant, quelques portions plus petites de forêt pluviale peuvent héberger plusieurs espèces d’amphibiens uniques sur l’île. Ces îlots de forêts sont cernés par des champs cultivés qui constituent un environnement pollué et peu idéal pour les amphibiens qui doivent les traverser ou tout simplement y survivre. Ce sont justement ces populations isolées qui subissent la plus grande menace d’extinction.

Bien sûr, les grenouilles malgaches sont bien adaptées à des modes de vie spécifiques, qui dépendent de l’écosystème dominant, soit une forêt pluviale, un marais ou une forêt caducifoliée. La destruction des habitats élimine les aires de reproduction, avec un effet négatif conséquent sur les populations naturelles. Par exemple, pour se reproduire, la Mantella grimpante (Mantella laevigata) doit avoir accès à plusieurs habitats. Si ces habitats sont séparés par des terrains cultivés ou des routes, les grenouilles ne peuvent pas se reproduire.

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Morphologie

La variété des amphibiens de Madagascar est surprenante en raison de la vivacité de leurs couleurs d’avertissement, de leurs colorations mimétiques, de leurs structures épidermiques, ainsi que pour leurs formes et dimensions. Une des caractéristiques les plus remarquables des multiples espèces de grenouilles malgaches est leurs couleurs chatoyantes. De nombreux animaux, dans le monde, utilisent la couleur pour repousser leurs prédateurs, comme les grenouilles flèches d’Amérique du Sud (définies comme aposématiques ou couleurs d’alerte). Les membres très colorés de la famille Mantellidae de Madagascar comme Mantella aurantiaca et Mantella baroni, produisent un alcaloïde au niveau épidermique, qui est une toxine repoussant les prédateurs. De nombreux scientifiques ont suggéré que les grenouilles sécrètent ce poison à partir d’un régime d’insectes comme les fourmis, qui contiennent des alcaloïdes. Cependant, certaines grenouilles ne recourent pas à des couleurs lumineuses pour se protéger, mais utilisent, en revanche, le camouflage. Des espèces malgaches adaptent leur mimétisme à l’extrême, non pas uniquement en utilisant des couleurs qui s’harmonisent avec l’environnement, mais en possédant une peau qui imite directement les lichens et les plantes (Boophis lichenoides et de nombreuses espèces arboricoles du genre Spinomantis).

Alors que le Boophis lichenoides adulte est bien camouflé, son têtard possède des bandes jaunes et noires. Les bandes jaunes et noires indiquent en quelques sortes que le têtard peut sécréter des toxines, mais comme cette espèce n’a que récemment été découverte, les scientifiques ne sont pas certains du rôle avertissant de ses couleurs.

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Reproduction

La plupart des Mantellas sont terrestres et passent le plus clair de leur temps au bord des rivières. Certaines grenouilles le passent à grimper et à vivre dans les arbres (arboricoles). Mais pour chaque style de vie, il y a différents types de défis – tout particulièrement en ce qui concerne la reproduction. Une grenouille « normale » pond ses œufs dans l’eau, les têtards émergent et se métamorphosent en petites grenouilles puis en adultes. Pour plusieurs grenouilles des forêts pluviales tropicales et des aires arides, pondre ses œufs directement dans l’eau n’est pas forcément envisageable. Soit les œufs sont mangés par des prédateurs, soit ils se dessèchent. Des grenouilles vivant près des rivières pondent leurs œufs sur le sol au bord de l’eau, alors que les grenouilles arboricoles tendent à les déposer à l’extrémité ou au bord de feuilles, au-dessus de l’eau. D’autres espèces de grenouilles arboricoles pondent leurs œufs sur des feuilles comme le Pandanus; l’eau contenue à la base des feuilles fonctionne comme une nurserie. Des poches d’eau formées dans les trous des troncs ou des bambous peuvent également servir de nurseries alternatives, spécialement pour des grenouilles comme la Mantella grimpante (Mantella laevigata) qui pond un nombre limité d’œufs ; par ailleurs, pour être sûre que ses têtards aient assez de nutriment pour permettre leur développement, la femelle adulte pond des œufs de « nourriture ». En général les têtards sont omnivores et ils mangent à la fois plantes et animaux morts ; quelques têtards filtrent l’eau alors que d’autres sont carnivores et se nourrissent de larve d’insectes ou d’autres têtards. Une fois développés, les jeunes têtards se libèrent du conglomérat d’œufs et tombent dans l’eau afin de poursuivre leur développement.

Plusieurs espèces malgaches pondent encore leurs œufs directement dans l’eau ou certaines utilisent des nids de mousse. Les mâles de Platypelis grandis protègent les œufs jusqu’à leur métamorphose. La protection des œufs se retrouve chez d’autres espèces de grenouilles à travers le monde, comme les Epipedobates tricolour d’Equateur ainsi que d’autres espèces Malgaches telles que les Mantidactylus argenteus, le mâle enlève les œufs infectés par des champignons pour permettre aux œufs sains de se développer.

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Menaces

Cinquante-cinq espèces sont menacées d’extinction et neuf sont considérées par l’UICN comme en danger critique d’extinction.

1/ Disparition d’habitat

La plus grande menace pour les grenouilles malgaches est la perte de leur milieu naturel, soit par la déforestation soit par la conversion de la forêt vierge pluviale en terre agricole. La plupart des grenouilles malgaches vivent sur la partie Est de l’île où la déforestation est particulièrement intensive.

Une grande part de la perte des habitats à Madagascar a été causée par la pauvreté des populations, qui convertissent les aires de forêt pluviale en terrains cultivés pour nourrir leurs familles. Les pressions sur l’habitat par le tavy (culture sur brûlis) ou par le prélèvement de matériau de construction ou encore comme combustible, ont un effet dramatique sur l’habitat et les écosystèmes ; de telles activités contribuent à isoler les aires adéquates à la vie des animaux et des plantes. Les habitats originels sont de plus en plus séparés par des zones stériles, ce qui est particulièrement problématique pour les grenouilles qui ont besoin de divers milieux naturels en fonction des différentes étapes de leur développement. Des espèces comme la Mantella verte (Mantella viridis) sont terrestres à l’âge adulte mais les têtards sont totalement aquatiques. Certains têtards ont besoin d’eau stagnante (Scaphiophryne spp.), alors que d’autres se développent uniquement en rivière (Mantidactylus lugubris). Idéalement, l’environnement a besoin d’être maintenu intact sinon il est essentiel d’assurer des patchs d’habitats disponibles aussi larges que possible pour pouvoir garantir la survie des populations d’amphibiens.

Les espèces les plus aquatiques semblent être les moins vulnérables aux changements d’habitats puisqu’elles peuvent survivre dans la plupart des voies fluviales. Mais il faut que ces voies soient très peu polluées et qu’il y ait toujours une forêt pluviale à proximité.

Les espèces qui sont adaptées aux zones arides sont donc naturellement plus résistantes et plus habituées aux changements saisonniers de leur environnement. Elles s’accoutument des modifications et dégradations de leur milieu naturel.

Cependant, les espèces qui ont une aire de répartition réduite ou qui dépendent totalement d’une forêt intacte, sont beaucoup plus sensibles à la déforestation. Puisque seulement une petite fraction de la forêt tropicale malgache reste intacte, il est probable que les espèces très spécialisées soient plus sensibles au risque d’extinction.

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2/ Pollution et réchauffement climatique

Les amphibiens sont très sensibles au milieu naturel, pas seulement par rapport au changement d’habitat, mais aussi à la concentration des agents chimiques dans ce milieu. Les grenouilles et les crapauds sont particulièrement vulnérables à l’augmentation de leur exposition aux ultraviolets qui peuvent abaisser leurs défenses immunitaires. Ce type de phénomène est lié à l’amoindrissement de la couche d’ozone qui génère plus de rayons nuisibles frappant la surface de l’île. La pollution d’origine anthropique (par les hommes) est la principale cause des rapides changements climatiques et de la dégradation de la couche d’ozone. Les grenouilles et les crapauds ont une peau hautement perméable ; elle absorbe facilement l’humidité de manière à rester moite pour éviter le dessèchement. La peau est donc sensible aux changements chimiques de son environnement. Pour cette raison, on a souvent étudié l’impact de ces changements qu’ils soient naturels ou dus à des activités humaines. Heureusement, la menace de pollution se retrouve à une échelle relativement faible à Madagascar, probablement parce que la majorité des fermiers n’ont pas les moyens d’utiliser des engrais pour leurs cultures et que l’agriculture commerciale n’est pas suffisamment intensive pour provoquer des dégâts étendus. La conversion de la forêt pluviale en terre agricole ou en pâturage pour le bétail a mis en danger de nombreuses espèces de grenouilles qui réussissent difficilement à s’adapter dans un territoire modifié par les hommes. Certaines espèces sont assez tolérantes aux modifications de leur habitat, mais celles qui n’ont pas réussi disparaîtront en l’absence de la forêt pluviale dont elles dépendent.

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3/ Alimentation

Certaines grenouilles de Madagascar sont également collectées à des fins alimentaires par les populations locales, en particulier les espèces du genre Mantidactylus (telles que M. guttulatus au Centre-Est de l’île et Boehmantis microtympanum du Sud-Est). Les noms en malgache de ces espèces sont «radaka» et «bakaka».

D’autres espèces utilisées pour l’alimentation sont Boophis goudoti sur le plateau et Hoplobatrachus tigerinus, une espèce introduite du sud-est asiatique. Dans certains cas, ce type de collecte, associé à l’altération du milieu forestier, peut représenter une menace pour les populations d’amphibiens.

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4/ Le commerce

Entre 1996 et 2002, plus de 140 millions d’amphibiens ont été vendus dans le monde entier. En 1998 plus de 31 000 Mantellas dorées (Mantella aurantiaca) ont été exportées de Madagascar vers le marché mondial. Le marché illégal des animaux domestiques est le plus lucratif après celui de la drogue et constitue la principale source des revenus d’une grande partie de la population des pays en voie de développement. Comme les animaux sont très précieux commercialement, un grand nombre est arraché à leur milieu naturel. Les espèces les plus demandées par le marché sont les Mantellas vertes (Mantella viridis), la Mantella arlequin (Mantella cowani), et la Mantella de Baron (Mantella baroni). Les Mantellas dorées (Mantella aurantiaca) et les grenouilles tomate (Dyscophus antongilii) sont aussi particulièrement recherchées par les collectionneurs. Comme elles sont actives pendant la journée et possèdent des couleurs flamboyantes, elles ne sont pas seulement faciles à attraper, mais sont également des animaux de compagnie très populaires. La demande élevée fait qu’elles sont chassées en quantité énorme et le fait d’extraire un nombre aussi important d’animaux de leur milieu naturel conduira probablement à leur extinction. Certaines espèces sont totalement interdites au commerce et d’autres protégées par des lois très restrictives qui contrôlent les exportations, mais il est presque impossible de contrôler leur collecte.

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5/ Un champignon assassin

Les amphibiens subissent un déclin dramatique au niveau mondial. Indépendamment de l’altération du milieu naturel, une des principales menaces sur les populations d’amphibiens est la diffusion de la Chytridiomycose. Cette maladie infectieuse des amphibiens causée par le champignon Batrachochytridium dendrobatidis, est connue depuis les années 1980 pour être responsable de dramatiques diminutions de populations voire d’extinctions de nombreuses espèces d’amphibiens dans le monde.

L’origine de ce champignon n’est pas bien connue : il a été trouvé en diverses parties du monde, aussi bien en milieu altéré qu’en milieu intact.

Le champignon agit en empêchant l’échange de gaz à travers la peau perméable de la grenouille, finissant par l’asphyxier. Là où le champignon est présent, les populations d’amphibiens sont très affectées. Plusieurs espèces ont déjà été touchées, et soit elles se sont éteintes, soit la taille des populations décline de façon dramatique. Aujourd’hui, on ne connaît aucun remède et la seule solution est de déplacer les populations d’amphibiens en les maintenant en captivité jusqu’à la restauration de leur habitat et jusqu’à ce que les zoospores (parties transmissibles du champignon) soient tuées ou rendues inactives.

Malheureusement, sa présence vient d’être révélée à Madagascar lors d’une de nos missions dans le Makay. Grâce à leur isolement, il est possible que les amphibiens malgaches aient développés une forme de résistance au champignon mais s’il n’y a pas de résistance, alors l’introduction accidentelle du chytride à Madagascar pourrait avoir un effet dévastateur.

Pour en savoir plus sur ce champignon.

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Conservation

Il n’y a pas de doute : les grenouilles malgaches doivent affronter de nombreuses menaces. Nous savons quelles sont ces menaces, mais la véritable question est de savoir comment neutraliser ou arrêter ces menaces qui font disparaître des espèces entières.

Jusqu’à présent, la plus grande menace sur les amphibiens et de nombreuses autres espèces animales était, de loin, la perte de leur milieu naturel primaire, particulièrement dans la partie Est de l’île. La priorité pour la conservation des amphibiens de Madagascar était donc de documenter l’état de répartition des différentes espèces et de créer des réserves ou des aires protégées et de sauver les petites forêts fragmentées. Quelques initiatives comme celles menées par le World Wide Fund for Nature (WWF) et Madagascar National Parks ont aidé à ralentir le déclin de la biodiversité de Madagascar. D’autres organisations non gouvernementales (ONG) comme l’, le Madagascar Fauna Group, Durrell Wildlife Conservation Trust, Conservation International, et aujourd’hui Naturevolution opèrent également à Madagascar dans ce sens.

Mais avec l’apparition de la chytride sur l’île de Madagascar, la priorité est aujourd’hui l’application en urgence de sévères pratiques d’hygiène durant les recherches sur le terrain. En outre, pour éviter les contagions, les amphibiens ne doivent pas être déplacés d’un site à l’autre. Il s’agit de mener une surveillance étroite de cette nouvelle et terrible menace que représente ce champignon, celui-ci pouvant mener à la disparition d’espèces encore peu ou pas connues avant même leur étude.

En 2010, craignant l’arrivée de ce champignon à Madagascar, un groupe de chercheur « Amphibian Specialist Group (ASG) » sous la direction du Dr. Franco Andreone a lancé le « chytrid monitoring program (CMP) » et une « Cellule d’urgence » pour gérer le problème le plus vite possible avant que la maladie ne soit transmise partout à Madagascar. Cette cellule a été immédiatement avertie de la découverte du champignon dans le Makay et Naturevolution s’est mis à sa disposition pour prendre les mesures nécessaires à la préservation des amphibiens du Makay et de l’ensemble de l’île.

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Les études et la recherche

Les informations sur les grenouilles malgaches sont limitées car l’étude est complexe et nécessite un long travail. Quelquefois, le simple fait de les trouver sur un site nouveau comporte une satisfaction ; surtout pour les espèces qui possèdent une aire de répartition très réduite. Dans certains cas, des espèces sont découvertes seulement près d’une rivière ou sur un versant de montagne. Nous savons peu de chose à propos du nombre d’espèces qu’il y a, de la taille de leur population, de leur mode de reproduction ou du type d’habitat dont elles ont besoin. Cette connaissance est essentielle pour la protection et la conservation des grenouilles en voie de disparition, il est donc indispensable de poursuivre les recherches à leur sujet.

Source :

« Amphibiens menacés de Madagascar » de Franco Andreone, Mike Bungard & Karen Freeman. © REGIONE PIEMONTE – MUSEO REGIONALE DI SCIENZE NATURALI – TORINO (ITALIE) en collaboration avec le Madagascar Fauna Group, The Living Rainforest et le St. Louis Zoo.

Document complété par Evrard Wendenbaum à l’aide des données et informations collectées sur le terrain par les herpétologues Elodie Courtois et Christopher Raxworthy.

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